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Aujourd’hui, depuis que la poésie ci-dessous avait été déjà publiée, en relisant attentivement (pour une énième fois) les premiers vers du texte original italien (daté 1974), je me suis aperçu que, même si ceux-ci étaient peut-être trop synthétiques et pas suffisamment clairs, mon interprétation récente avait été une trahison excessive. Donc, quant à ces vers initiaux, je me suis permis de me rapprocher de l’original, sauf garder, dans la note au fond du texte, la mémoire de la traduction-trahison précédente.
Juste un mètre
Pour toutes les choses que j’ai dit
(bureaucratiques rythmes
empâtés de dentifrice sec)
depuis une fenêtre
entourée d’une foule de pancartes
(gare à l’incompréhension réciproque !
Assez, de l’ignorance
du sens véritable des mots !
On ne peut snober la politique !) [i]
pour toutes les tâches inutiles
que j’ai essayé,
péniblement, d’accomplir
en contournant
les toiles d’araignée
d’objets refusés
d’amours désaffectés
de vêtements grandioses
en dribblant aussi
un passé familial
dans les placards
d’une maison abandonnée
hantée par les odeurs
de bohémiens en fuite
pour toutes les choses utiles
que je n’ai pas faites — idiot !
pour la danse endormie
au-dessus de toi
me traînant
dans tes bras mouillés
tout en rêvant
de ce long train
avançant lentement
dans la galerie
de ta bouche
jetant des étincelles
parmi le réverbère émerveillé
de tes yeux fatigués
pour la force isolée d’un jour
(presque une anecdote
racontée par des autres)
moi, la chemise collée à la peau,
brûlante comme une idée sauvage,
j’ai la force de dissoudre
ce brouillard de tours vicieux,
la force de te prendre
sans effraction ni vol,
mais ainsi, librement,
comme s’il y eût une guerre
qui tout accorde
aux gens rusés
(et aux ineptes aussi).
Tandis que je parcourais
désespérément mon destin
et que je m’y accoutumais,
déroulant, satisfait dans mon fauteuil,
les restes de ma mémoire
le temps, autour de toi
a fait des tours et des détours
tout à fait inattendus
en traînant ta silhouette aimée
juste un mètre.
Giovanni Merloni
[i] Pour tous ces mots, que j’ai dit (la bouche empâtée de dentifrice) ; que j’ai dit sans le savoir, sans réfléchir ; que j’ai dit en répliquant des rythmes de bureau ; pour tous ces mots d’ordre hurlés depuis une fenêtre entourée d’une foule de pancartes ; pour ces mots conscients, de rébellion contre l’incompréhension réciproque ; pour ces mots ennemis de toute corruption de la vie publique, de toute ambiguïté idéale, de toute sous évaluation de la politique ; pour ces mots qui voudraient vaincre l’ignorance obtuse de tous ceux qui haïssent la vérité…
TEXTE ORIGINAL EN ITALIEN :
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