le portrait inconscient

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Archives de Tag: Giacomo Leopardi

Petit vocabulaire de poche

12 jeudi Juin 2025

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Albert Camus, Carlo Levi, Claudia Patuzzi, Dante Alighieri, Giacomo Leopardi, Italo Calvino, Jacques Prévert, Jean-Paul Sartre, Jorge Luis Borges, Primo Levi, Umberto Saba, Vincenzo Consolo

La passerelle Bichat, canal Saint Martin (Paris 10e), acrylique sur toile de Paolo Merloni, 2025

Texte de Claudia Patuzzi

Petit vocabulaire de poche

Partout seule,
partout étrangère,
j’ai compris que les mots
(comme les pierres[1])
ont le pouvoir d’abattre
langues et frontières.

Combien de mots tombent-ils bruyamment ?
Combien d’eux traînent-ils dans le vent ?
Ou alors restent muets, dans le cachot du cœur ?

Il y a des mots en guise de péniches
rapides et légères
s’échouant sur la rive de l’autre
tout en gardant le sourire
d’un marin inconnu[2] .

Il y a des mots en forme de flèches,
des mots aigus [3] comme des cristaux,
capables de briser l’écran gris
de l’indifférence et de la résignation.

Il y a des mots à la nature d’oiseaux,
curieux et vagues, [4]
ayant la force de ressusciter l’espoir
que la solitude cache.

Il y a les mots enfantins,
sautillant comme autant d’écureuils,
des mots nous aidant
à retrouver nous-mêmes
dans la clairière d’un jardin perdu.[5]

Il y a des mots de biais,
réfractant nos questions
tels les reflets d’un miroir,
des mots hantés de mystères
de labyrinthes et de rêves.[6]

Il y a des mots à l’allure d’ondes
qui traversent les derniers refuges
de l’histoire, arpentant tous les enfers
et le cimetières du monde.

Il y a des mots au parfum de fleurs,
rouges comme le sang des innocents,
des mots s’épanouissant
jusque sur les tombeaux
pour nous rappeler l’injustice.[7]

Il y a des mots qui vont en couple
ou en rime, qui nous racontent
(joliment, en boucle)
les mêmes histoires connues :
« amour-fleur-cœur.» [8]

Au fond de tous les mots,
au bout de l’horizon, vous trouverez
les mots se sauvant dans le vent
le vol fou [9] de mots minuscules
se perdant dans l’espace
d’une bulle de savon.

Pour en finir, refoulés qui sait où,
il y a des mots tout à fait inventés
qu’on n’a pas encore reconnus
ni transcrits, et qui poussent pourtant,
comme des poussins dans le nid,
contre leurs coquilles.

002bis-finestra-gatto180améliorè

Claudia Patuzzi

(Traduction de Giovanni Merloni)

[1] Carlo Levi [2] Vincenzo Consolo [3] Albert Camus et Jean Paul Sartre [4] Jacques Prévert et Giacomo Leopardi [5] Italo Calvino [6] Jorge Luis Borges [7] Primo Levi [8] Umberto Saba [9] Dante Alighieri

TEXTE ORIGINAL EN ITALIEN

Publié la première fois le 12 avril 2014 sur « Décalages et métamorphoses »

L’infini/L’infinito (La pointe de l’iceberg n. 8)

19 lundi Nov 2018

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Giacomo Leopardi, La. pointe de l'iceberg

L’INFINI 

Toujours me fut si cher ce mont sauvage,
Et cette haie qui pour si grande partie
Du dernier horizon la vue m’exclut.
Mais si assis je regarde, d’interminables
Distances au-delà d’elle et des silences
Surhumains, et les profondeurs du calme
Dans l’esprit je me peins, d’où pour un rien
Mon cœur va s’effrayer. Et quand j’entends
Le vent bruire entre ces plantes,
Ce silence infini à cette voix
Vais comparant : je me souviens alors de l’éternel,
Des saisons mortes, de la présente
Encore vive et du son d’elle. Ainsi, dans telle
Immensité se noient toutes mes pensées
Et le naufrage m’est doux dans cette mer.

Giacomo Leopardi (traduction Giovanni Merloni)

Voilà ma dernière traduction du texte poétique plus important de la littérature italienne moderne : « L’infinito » (« L’infini ») de Giacomo Leopardi (1798-1837). Je le fais dans la pleine conscience de mes limites. Mais, en même temps, conscient aussi de la nécessité d’une provocation. Je me suis en fait convaincu qu’il est vraiment très difficile de traduire une poésie d’une langue à l’autre. Par exemple, c’est presque impossible traduire « Le bateau ivre » en italien. J’ai essayé plusieurs fois et toujours abandonné, même si j’ai la présomption d’en avoir cueilli la musique et le rythme. En tout cas, je crois que seulement un écrivain, un véritable poète peuvent arriver à cela. C’est un énorme travail créatif et sauf des exceptions il faut se méfier de la traduction d’entières anthologies. Par un travail long et immense, Jacqueline Risset, qui est sans doute une poète, a su faire ça, arrivant à traduire la « Divina Commedia » de Dante (1265-1321). Mais, Dante, grâce à ses symboles, à ses allégories et sa solide structure narrative, peut se traduire peut-être plus facilement que Leopardi. Celui-ci s’exprime par des mots très simples, qui ont d’ailleurs leur place précise dans le texte, toujours fortement évocateur de valeurs profondes et universelles.

Ce serait surtout fautive la traduction de Leopardi au pied de la lettre. Car il faut toujours garder quelques piliers…

Dans un poème qui commence par « Sempre caro mi fu quest’ermo colle » il ne faut surtout pas traduire « caro » avec « tendre », peut être plus correspondant dans la stricte signification. On peut trouver d’autres termes pour les autres mots, mais « caro » est le point d’appui de ce premier vers et, je crois, de tout le poème.

En une première traduction, par exemple, j’avais cru que s’adapterait mieux, ici, le mot « charmille », inventé par Mauriac pour décrire sa haie de Malagar, qui a d’ailleurs la même fonction de « filtre » entre l’observateur (assis) et l’infini. Pour une question de rythme musical, je dois maintenant revenir au mot « haie » pour traduire le mot italien « siepe » (une « balustrade végétale »). 

Giovanni Merloni

002_semprecaromifu x blog_740

L’INFINITO 

Sempre caro mi fu quest’ermo colle,
E questa siepe, che da tanta parte
Dell’ultimo orizzonte il guardo esclude.
Ma sedendo e rimirando, interminati
Spazi di là da quella, e sovrumani
Silenzi, e profondissima quiete
Io nel pensier mi fingo, ove per poco
Il cor non si spaura. E come il vento
Odo stormir tra queste piante, io quello
Infinito silenzio a questa voce
Vo comparando: e mi sovvien l’eterno,
E le morte stagioni, e la presente
E viva, e il suon di lei. Così tra questa
Immensità s’annega il pensier mio:
E il naufragar m’è dolce in questo mare.

Giacomo Leopardi

Petite digression sur l’infini 4/4

07 jeudi Mar 2013

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Giacomo Leopardi, Portraits de Poètes

001_l'io legato e la libertà x blog 740

Chère Catherine,
Mon portrait inconscient se multiplie et se complique, apparemment. Car il m’a un peu trop dérangé avec suggestions et digressions qui m’ont amené : d’abord à abandonner mon grand-père pour parler de Pascoli ; ensuite à abandonner Pascoli et son père, juste au seuil de la République romaine de 1849, pour revenir en arrière au Leopardi de Recanati et finalement à Foscolo, désespéré comme Ajax devant le paysage abrupt et douloureux des Apennins. Dans mon voyage à rebours, j’étais désormais revenu à la République cisalpine de 1797…
D’ailleurs, Catherine, ne s’appelle-t-il pas portrait inconscient ? Donc, d’un côté « inconscient », c’est-à-dire difficile à maîtriser, de l’autre « portrait », soumis aux règles de l’inspiration. En plus, ce portrait inconscient se déroule dans un blog que quelques-uns lisent au jour le jour. Un portrait vivant, qui assume sa personnalité au fur et à mesure.
Il y a eu des coïncidences aussi.Non seulement de coïncidences extérieures, comme la publication sur publie.net du dernier ouvrage d’Isabelle Pariente-Butterlin, «L’infini, que j’ai apprise le jour même de la sortie du 18e volet de ce « portrait d’une table » consacré à l’infini du Jacopo Ortis d’Ugo Foscolo. Il y a eu aussi l’expérience des « vasescommunicants » de mars avec Élisabeth_Chamontin. Une rencontre très positive, du moins pour moi. Je la suivais sur Twitter et j’avais beaucoup apprécié un conte à surprise qu’elle avait écrit à propos d’un mur et d’une bicyclette.
Ce mur est arrivé au juste moment, se rencontrant avec notre envie de parler de la traduction et, par la traduction, de la complexité des rapports entre les langues, notamment entre le français et l’italien, et vice versa. Donc, nous avons décidé de nous adresser des textes ayant au centre le thème du mur-frontière unissant et séparant deux mondes qui ont d’ailleurs entre eux beaucoup de points en commun. Un mur mitoyen.
Je serai rentré diligemment dans mon engagement ancien, retrouvant Foscolo et son idée très actuelle de la mort et de l’éternité, ou bien j’aurais parlé finalement d’un autre grand exilé, Giuseppe Mazzini — héros de la République romaine, vrai père de la patrie italienne —, si je ne me fus souvenu, ma chère Catherine, de cette nouvelle que j’avais écrite trois ans après mon arrivée à Paris. Tu te rappelles le titre, «La cloison et l’infini» ?
Il y a une espèce de magie, qui guide mes mains ou plutôt mes doigts sur le clavier de l’ordinateur ou de la tablette. Car cette nouvelle parle d’un mur mitoyen, d’un petit balcon, d’une balustrade, du petit infini d’une cour parisienne et du grand infini insondable de Leopardi. Et un des protagonistes… est venu d’Italie en vélo, franchissant plusieurs murs !
Je te demande donc de patienter encore un peu. Car, après la petite digression, pas encore achevée, sur l’infini et les infinies balustrades possibles, cette exploitation « pratique » du thème de l’infini servira beaucoup à la cohérence finale du tableau. Après les quatre volets de cette petite tragédie, on reviendra à notre passionnante routine. Ciao, je t’embrasse, G.

Giovanni Merloni

(Giovanni Merloni, La cloison et l’infini épisode_1 épisode_2 épisode_3 épisode_4)

Petite digression sur l’infini 3/4 — La beauté fragile

26 mardi Fév 2013

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Giacomo Leopardi, Portraits de Poètes

001_faro grecia x blog_740

Digression sur l’infini/3 — La beauté fragile

« A EGREGIE COSE IL FORTE ANIMO ACCENDONO L’URNE DEI FORTI… »
« Pour de hauts faits l’âme du fort s’enflamme
Devant l’urne des forts, ô Pindemont ; et belle
Et sacrée elle fait au pérégrin la terre
Qui les recueille… »
Ugo Foscolo « Les Tombeaux » (1807)
Traduction de Gérard_Genot)

Tu vois, Catherine, les coïncidences. À la veille d’élections cruciales en Italie on est juste sortis, et timidement, toi de ta grippe, moi de ma paresse… Il a suffi de s’occuper de l’infini, de chercher une pause pour ne pas se faire submerger par un récit risquant la nostalgie et le perfectionnisme excessifs, pour découvrir, en passant et même à la volée le personnage d’Ugo Foscolo…
Ugo_Foscolo
002_rodo_montagna x foscolo_740_defOn n’a même pas eu le temps de le connaître, d’en savourer quelques vers immortels… Foscolo a tout de suite glissé sous nos yeux d’un air timide, sortant de l’Italie « à l’anglaise » pour s’exiler, tout comme d’autres malchanceux enfants de la patrie italienne. Avait-il d’autres possibilités ? Bien sûr, l’exil n’est pas une solution idéale. En s’exilant, il s’est sauvé, peut-être, mais il a dû souffrir énormément, pendant le reste de sa vie, de cette rupture. Comme d’ailleurs souffrent aujourd’hui les Italiens qui pour d’infinies raisons se sont définitivement installés à l’étranger, vis-à-vis de cette tragique incapacité des Italiens d’Italie – malheureusement confirmée, juste hier, par un résultat électoral assez inquiétant – de s’en sortir tandis qu’une crise de la démocratie et même de l’identité de ce pays, essentiel pour l’Europe, dure désormais depuis trop de temps.
Quoi faire devant les infinies raisons de l’exil ? Comment considérer les solutions adoptées par chacun – entraînant des destins personnels et en même temps reflétant les destins d’entières collectivités – vis-à-vis des infinis paysages qui évoquent, en général, l’impact de l’homme avec le mystère de l’infini ? Est-ce que ces derniers ne deviennent pas, à la lumière de l’actualité, des tableaux statiques et tristement inefficaces ? Je ne crois pas. D’ailleurs, même dans les moments les plus dramatiques, il faut toujours trouver le temps de réfléchir.

Je reprends alors mon chemin : le paysage décrit par Jacopo Ortis dans sa lettre du 13 mai 1798, prémonitoire de ce que Foscolo devait vivre en première personne en 1816, m’a rappelé plusieurs passages successifs de Leopradi, dont L’infini, me faisant comprendre surtout la force morale et symbolique du message foscolien… Mais le texte du poète m’a évoqué aussi des images que moi-même j’ai vu ou pour mieux dire ressenti dans la plupart des paysages de Romagne, où la fragilité ne fait qu’un avec une beauté extraordinaire (et vice versa). Voilà la raison de la publication, dans l’article du 24 février dernier, de photos du paysage typique de l’Apennin entre Marches et Romagne qu’a su choisir et interpréter très efficacement Italo Insolera — architecte et urbaniste récemment disparu, auteur de l’incontournable « Rome moderne », long essai qui décrit magistralement la « transformation » urbaine et sociale de cette ville au lendemain de l’achèvement de l’Unité nationale avec le déplacement là de la Capitale, texte assez célébré jusqu’aux années 80, ensuite mis de côté sinon trahi.
Italo_Insolera
Roma_moderna

Comment concilier le thème de l’infini, celui de la « beauté fragile » de l’Italie – avec tous ses trésors mal gérés et protégés – et le troisième thème, celui des « hauts faits » ? Comment parler de toutes ces choses nécessaires et vitales comme l’air qu’on respire, sans perdre le fil ? Comment concilier le panthéon de Santa Croce de Florence avec la force suggestive de l’infini romantique, du spleen poétique et mystique devant un paysage que baigne une lumière tout à fait spéciale, capable, en elle même de raconter, dans les passages subtils de l’aube au matin, du matin au plein jour, du plein soleil (ou plein noir de nuages immobiles et redoutables) aux infinies nuances du couchant ?
Santa_Croce_de_Florence

003_paysage 740 antiqueJe dirais une chose seulement, Catherine, un seul mot, « harmonie ». Une « harmonie » qui ressuscite à chaque fois comme si de rien n’était dans les fresques d’un Piero de la Francesca ou dans les vers de Leopardi. Cependant, cette harmonie, ce formidable et unique équilibre — entre les pulsions romantiques (ou aussi gothiques) et le perpétuel retour à la culture classique, dont les Italiens sont imprégnés comme Obélix de la potion magique de Panoramix — n’arrive jamais sans que les passions se déclenchent et que les hommes se sacrifient. Une harmonie qui cache à peine des fleuves de sang. Je découvre l’eau chaude, Catherine ? Oui, peut-être.

004_paysage 740 x blogEn tout cas, l’infini s’est imposé tout seul. J’avais besoin de parler de l’infini moins connu qu’on peut regarder depuis la balustrade en fer forgé de Sogliano, qui est peut-être un calque de l’infini de Recanati. Je n’osais espérer m’accouder à la grande muraille chinoise pour scruter au loin l’arrivée des Tartares de Buzzati, ni même regarder Gênes depuis les premières collines, comme fait Paolo Conte dans sa plus célèbre chanson « Genova per noi ». Le monde est plein d’infinis, plus ou moins spectaculaires. Dans mon sentiment personnel — à la fois romantique et anxieux d’harmonie — je ne peux pas concevoir l’infini sans les hommes qui travaillent, les trains qui parcourent une ligne à peine visible au loin, sans l’histoire qui s’affiche à travers de petites traces. Donc il y a une cohérence entre le spectacle vivant du mystère tragique de la vie que Monet essayait et réussissait presque à bloquer sur ses toiles en série consacrées à la cathédrale de Rouen et l’infini travailleur et subtilement douloureux que décrivent Foscolo et Leopardi, mais aussi Carducci et Pascoli, que décrira aussi Pavese et bien d’autres protagonistes et témoins du dernier siècle. C’est, au fond, le même infini qui bouge comme une fourmilière au-delà du parapet du Rouge et Noir de Stendhal, le même infini que les parapets d’Europe de Rimbaud font rebondir sur son bateau ivre. Rien à voir avec un infini où la Nature et les hommes assument, même de façon inconsciente, un rôle sombre, menaçant, belliqueux. Je partage, ma chère Catherine, cette vision confiante de l’infini. Même si la vie nous amène de plus en plus au pessimisme — qui peut-on trouver de plus pessimistes sur le destin humain qu’un Rousseau, un Foscolo ou Pasolini, mes maîtres de vie ? — je crois qu’il faut toujours croire à la substantielle bonté de l’homme, à son amour pour la nature qui, en soi, incarne une substantielle positivité.

foscolo 1 Ugo Foscolo (Île de Zante, 1778 – Londres,1827)

Donc les infinis de Leopardi et de Stendhal, protégés par les « parapets d’Europe » merveilleusement évoqués par Rimbaud sont tout à fait compatibles avec les « panthéons » des grands hommes dont Santa Croce à Florence, protagoniste du célèbre poème des « Sepolcri », est le prototype et le repère moral.

Mais venons, chère amie, aux coïncidences d’aujourd’hui. La première, la plus choquante pour moi, vient de deux dates : 13 mai 1798, 14 mai 1898, auxquelles j’ajouterais, timidement et un peu pour jeu, un troisième date, 30 mai 1998… Comme tu as lu hier, la première date se situe à l’intérieur d’un journal de bord tumultueux et dramatique où Jacopo Ortis, incarnant Ugo Foscolo et son destin de sacrifice et d’exil, avoue ses passions intimes, exaltant en même temps ses fautes et se lançant en analyses aussi radicales que justes. Albert Camus aurait peut-être appelé Jacopo Ortis un « juste ». Cependant, il n’avait certainement pas les caractéristiques d’un vrai révolutionnaire comme Giuseppe Mazzini (1805-1872), qui justement théorisait la fusion de « pensée et action ». Il n’était pas non plus un redoutable brigadiste, quelqu’un qui dans le meilleur des cas se dupe de changer le monde par une guérilla décidée en théorie. Foscolo, comme Pasolini, Rousseau et Victor Hugo, est un homme intransigeant qui réfléchit beaucoup avant d’exprimer librement ses idées. D’ailleurs, comme la plupart des artistes, grâce à son énorme sensibilité et à l’inévitable souffrance qui va avec, il « voit » les contradictions là où elles se créent. Il voit le mal et, puisqu’il est libre en dehors de tous les enjeux, il le dit. Pas tous les génies incommodes ont eu la chance de publier les Misérables ou Châtiments comme Victor Hugo, ayant ainsi la possibilité d’aider la « bonne cause » de l’extérieur. J’aime profondément Victor Hugo et je ne peux que me réjouir du fait qu’un personnage comme ça — prophète en patrie et aussi prophète en dehors de sa patrie — ait pu vivre sous les caresses de ses lecteurs, et survivre encore, sous les yeux caressants de la postérité, dont je fais part. Mais pour un Victor Hugo il y a mille, dix mille cent mille poètes que la poésie a obligé à la cohérence, à l’intransigeance, à l’exil et plus souvent à la mort. Donc cette date 13 mai 1798, même inscrite dans une histoire romanesque  aussi douloureuse que flâneuse, où l’esprit de l’oubli assume un rôle central, aussi important que celui de la sagesse, n’est pas seulement la date consacrée au paysage infini d’une Italie entre colline et montagne que notre héros se plaint de devoir abandonner à jamais. C’est une date historique aussi. La date de la déception de plusieurs patriotes, anticipateurs de l’idée unificatrice du Risorgimento, la déception amère et insupportable d’esprits imprégnés des idéaux de la Révolution Française qui avaient cru en Napoléon. D’ailleurs, on ne peut pas oublier que le drapeau tricolore italien (blanc, rouge et vert),  est né avec la République Cisalpine que Bonaparte avait si fortement soutenu. Or, Foscolo, né dans une île grecque liée historiquement à l’Italie par le biais de Venise, avait grandi à Venise qui était devenue sa patrie. Il n’y a aucun doute que Venise, ville unique au monde et patrimoine de l’humanité, est une ville qui ne pourrait être plus italienne. Un symbole aussi de cette unité nationale dont les patriotes comme Foscolo (et son frère Giovanni, très actif à Forlì dans la première République Cispadane et promoteur entre autres de l’adoption du tricolore d’inspiration jacobine) ne pouvaient pas se passer. La cession pragmatique que Napoléon accepta, de Venise à l’Autriche, déclencha en Foscolo (et en général en tous les patriotes songeant à une Italie unie et souveraine sur son territoire) un procès graduel qui terminera en 1816 avec l’exil en Angleterre.

005_la grecia di foscolo 740

Revenant à ce moment tout à fait particulier de la République Cisalpine de 1797-1799, qu’alors on appelait le « république sœur », je ne peux pas me passer de voir en cette « promesse » qui aboutit dans l’échec (échec d’ailleurs anticipateur, au niveau local, de l’échec général de Napoléon en Europe), une anticipation d’une autre « promesse », la République romaine du 1849, née dans la vague des mouvement de 1848 et de la deuxième République en France, elle aussi « république sœur ». Il est vrai que l’Histoire n’est faite que très rarement par les peuples…

Pour finir, chère Catherine, je voudrais te dire une dernière chose. Venise, même se  détachant en plusieurs aspects de la physionomie des autres villes italiennes (comme Bologne, ou Gênes, Florence ou Rome), tout comme Naples, ne pourrait être plus italienne. Impossible de séparer les vénitiens et les napolitains, comme les toscans d’ailleurs, d’une image unique de cet étrange mais évident peuple italien. Que ferait la culture italienne sans Arlequin, Pulcinella et Pinocchio ? Bientôt je te parlerai de ces trois masques et personnages qu’on peut rencontrer partout en Italie, comme en Espagne on rencontrerait Don Quichotte ou en France Pierrot et Jacques Tati… Et je te parlerai aussi de Don Abbondio, le triste mais très intéressant personnage qu’Alessandro Manzoni a inventé et qui est devenu avec le temps un modèle plutôt négatif, presque un alibi pour le manque de courage et l’opportunisme qui serait « typiquement italien ». Un personnage qui a trouvé en Alberto Sordi un magistral interprète, aussi performant que cynique, hélas. Bon, Catherine, excuse-moi de mes divagations qui feraient bien sûr retourner Foscolo et Zvanì – mais aussi Goldoni et Garibaldi — dans leurs tombeaux silencieux et égarés.

Après ce 13 mai 1798, je m’engage à developper les deux autres dates cruciales dans une des prochaines lettres…

Giovanni Merloni

écrit ou proposé par : Giovanni Merloni Première publication et Dernière modification 26 février 2013.

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Petite digression sur l’infini 1/4

23 samedi Fév 2013

Posted by biscarrosse2012 in les portraits, mes contes et récits

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Giacomo Leopardi, Portraits de Poètes

001_semprecaromifu x blog 740

Photo Merloni, reproduction interdite

L’INFINI de Giacomo Leopardi
(traduction de Giovanni Merloni)

Toujours me fut si cher ce mont sauvage,
Et cette haie qui pour une si grande part
Du dernier horizon la vue m’exclut.
Mais si assis je regarde, d’interminables
Distances au-delà d’elle et des silences
Surhumains, et les profondeurs du calme
Dans l’esprit je me peins, d’où pour un rien
Mon cœur va s’épeurer. Et quand j’entends
Le vent bruire entre ces plantes,
Ce silence infini à cette voix
Vais comparant : je me souviens alors de l’éternel,
Des saisons mortes, de la présente
Encore vive et du son d’elle. Ainsi, dans telle
Immensité se noient toutes mes pensées
Et le naufrage m’est doux dans cette mer.

Petite digression sur l’infini/1

Après une interruption plus longue que prévu, le « portrait inconscient d’une table » réapparaîtra bientôt sur ces écrans avec la vraie histoire de la mort du père de Giovanni Pascoli, les difficiles adolescences parallèles de Pascoli et Zvanì, jusqu’au dénouement du mystère des noms des participants à la veillée de Sogliano-al-Rubicone, il y a cent ans, en 1913.

Cependant, dans ma proverbiale sincérité, je me vois obligé à expliquer au lecteur et à la lectrice du « portrait inconscient » les raisons de cette rupture.

La principale a été la maladie qui a touché mon amie Catherine. Elle va bientôt s’en sortir, bien sûr, mais cela n’a pas été ce qu’en Italie on appelle « la route du potager ». La pauvre, harcelée par une grippe dure, ne pouvait même pas rejoindre l’ordinateur pour lire mes lettres ou me lancer un signal que ce soit. Je me suis arrêté. Je ne pouvais pas faire semblant qu’elle me lisait quand même, ou le faire croire à vous qui me lisez avec confiance.

Cela a entrainé, évidemment, plusieurs réflexions sur le sens (et aussi le contre-sens) d’une écriture comme ça.

J’en ai parlé franchement avec Catherine, lui demandant si je pouvais, exceptionnellement, la remplacer pendant quelques jours… elle a dit oui, bien sûr, mais je n’ai pas trouvé d’emblée quelqu’un qui pouvait me soutenir avec le même enthousiasme aveugle qu’elle. Je ne dis pas que Catherine est bienveillante a priori, ce n’est pas ça… Mais, effectivement, vous allez la connaître, car je vous en ferai bientôt le portrait, Catherine est capable de s’aveugler lorsqu’elle estime une personne… ou pour mieux dire ce qu’une personne fait : contre mon avis incertain, Catherine a toujours insisté sur l’utilité de cette recherche. Selon elle, la mémoire d’une certaine Italie peut intéresser quelqu’un, même plusieurs…

Voilà la première raison de cette rupture.

Mais, il y en a une autre. Je peux garder plusieurs secrets, les révéler plus tard, au moment donné, attendre que le tableau soit achevé… Mais je ne peux plus taire le point essentiel, le nœud gordien — l’Aleph peut-être — où toutes les routes mystérieuses de mon existence se croisent et se mêlent dans une pelote très embrouillée.

Un lieu. Un lieu qui d’ailleurs n’a pas vraiment une énorme personnalité et importance, sauf pour moi, peut-être. Ce lieu se trouve à Sogliano, juste en dehors de cette sombre maison où le dîner qui fête mon grand-père Zvanì ne cesse de se dérouler. Un lieu d’ailleurs fort ensoleillé, brûlant de soleil, m’obligeant, après quelques minutes d’étourdissement, à rentrer à la hâte dans cette maison, à demander à mes tantes-cousines de refermer les volets des fenêtres, à me retrouver dans une sensation identique à celle que décrit si poétiquement François Mauriac toutes les fois qu’il parle de son été à Malagar ou des sombres histoires de familles plongées dans la chaleur des Landes….

Ce lieu « incliné » à l’orée du village n’est que le bout d’une anonyme route montante, la même qui a inspiré un incontournable poème de Pascoli, longée par une très simple balustrade en fer forgé… Au-delà de cette balustrade, on peut se réjouir d’un panorama toujours changeant, aussi abrupt qu’heureux. Ma chère Romagne, je pense à toi à la veille d’élections terribles, cent ans après celles qui amenèrent Zvanì à la Chambre des Députés du très jeune Royame d’Italie… Je m’amuse à rechercher les couleurs des collines et des villages… tandis que là-bas une Babel déchirante envahit les discussions et meurtrit les espoirs. Non, je veux croire que mon pays s’en sortira, que la moitié généreuse et responsable de cette nation coupée en deux sera capable de convaincre l’autre moitié, égoïste et aveugle, à reprendre le chemin vertueux d’une construction graduelle, partagée, honnête, dans le respect de ce merveilleux territoire et des trésors d’art et de culture que tout le monde nous envie.

Voilà, mes chers lecteurs pour la plupart français, vous aussi concernés par ce qui se passe dans le pays voisin (votre cousin), je vous ai avoué les raisons de mon silence, que je vais rompre, aujourd’hui, pour entamer une petite, mais nécessaire digression.

Comment parlerai-je de la balustrade de Sogliano et de son rôle central et dramatique dans la suite des événements qu’on y narrera sans faire mention de Leopardi, Foscolo, Goya et Mauriac ?

J’entame ma première petite digression d’aujourd’hui par une énième tentative de traduction du texte poétique plus important de la littérature italienne moderne : « L’infinito » (« L’infini ») de Giacomo Leopardi (1798-1837). Je le fais dans la pleine conscience de mes limites. Mais, en même temps, conscient aussi de la nécessité d’une provocation. Je me suis en fait convaincu qu’il est vraiment très difficile de traduire une poésie d’une langue à l’autre. Par exemple, vous ne le croirez pas, mais c’est presque impossible traduire « Le bateau ivre » en italien. J’ai essayé plusieurs fois et toujours abandonné, même si j’ai la présomption d’en avoir cueilli la musique et le rythme. En tout cas, je crois que seulement un écrivain, un véritable poète peuvent arriver à cela. C’est un énorme travail créatif et sauf des exceptions il faut se méfier de la traduction d’entières anthologies. Par un travail long et immense, Jacqueline Risset, qui est sans doute une poète, a su faire ça, arrivant à traduire la « Divina Commedia » de Dante (1265-1321). Mais, Dante, grâce à ses symboles, à ses allégories et sa solide structure narrative, peut se traduire peut-être plus facilement que Leopardi. Celui-ci s’exprime par des mots très simples, qui ont d’ailleurs leur place précise dans le texte, toujours fortement évocateur de valeurs profondes et universelles.

Ce serait surtout fautif la traduction de Leopardi au pied de la lettre. Car il faut toujours garder quelques piliers…

Dans un poème qui commence par « Sempre caro mi fu quest’ermo colle » il ne faut surtout pas traduire « caro » avec « tendre », peut être plus correspondant dans la stricte signification. On peut trouver d’autres termes pour les autres mots, mais « caro » est le point d’appui de ce premier vers et, je crois, de tout le poème.

En même temps, par exemple, le mot « haie » ne tient pas debout, au point de vue du rythme musical, comme traduction de l’italien « siepe » (une « balustrade végétale »). Je crois qu’ici s’adapte mieux le mot « charmille », inventé par Mauriac pour décrire sa haie de Malagar, qui a d’ailleurs la même fonction de « filtre » entre l’observateur (assis) et l’infini.

Je vous parlerai demain plus à fond de cette poésie, où l’on découvrira aussi des emprunts évidents des « Lettres de Jacopo Ortis » d’Ugo Foscolo (1778-1827), un autre Italien que les Français devraient absolument connaître…

Giovanni Merloni

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Photo Merloni, reproduction interdite

L’INFINITO di Giacomo Leopardi

Sempre caro mi fu quest’ermo colle,
E questa siepe, che da tanta parte
Dell’ultimo orizzonte il guardo esclude.
Ma sedendo e rimirando, interminati
Spazi di là da quella, e sovrumani
Silenzi, e profondissima quiete
Io nel pensier mi fingo, ove per poco
Il cor non si spaura. E come il vento
Odo stormir tra queste piante, io quello
Infinito silenzio a questa voce
Vo comparando: e mi sovvien l’eterno,
E le morte stagioni, e la presente
E viva, e il suon di lei. Così tra questa
Immensità s’annega il pensier mio:
E il naufragar m’è dolce in questo mare.

écrit ou proposé par : Giovanni Merloni Première publication et Dernière modification 23 février 2013.

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