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Ma ville à moi est une femme débraillée, malicieuse, s’allongeant dans une étreinte sauvage. Elle est une sorcière hypocrite, qui dort avec nous. Elle n’a pas vu le couchant, ni les premières étoiles, ni la mort rentrée dans les boulevards. Elle est rose, sereine, invitante. Même si elle n’a pas vu la mort, elle dort avec nous.
Hier, ignares de l’enchantement que nous allions violer, nous avons frôlé les statues de marbre et les haies touffues de Villa Borghese. Contre les pins — de grandes girafes aux écorces luisantes — les lauriers agitent leurs feuilles odorantes, tandis que nous retenons le souffle en nous effondrant dans les prés trempés par mille rosées. Étonné, je ne comprends pas le sens de cette lumière blanche. Dans cet étrange silence, je ne réussis même pas à t’effleurer la manche. En marchant sans émoi à côté de moi, tu fredonnes la sérénité, tu prêches la liberté, mais je ne vois pas de la fierté dans tes yeux, de la pitié dans tes vœux. Tu n’es que l’ombre mensongère de cette paix sincère. Je ne te crois pas, mais quand tu m’appelles depuis le bord de la fontaine, cachée derrière une colonne de lierre, quand tu me caresses par le vent de ton parfum (imprégné de pluie et de musc), ça coule, derrière toi, un irrésistible sillage : un soupir dans le gravier de l’allée, un salut bref dans une feuille morte, un baiser léger sur ta bouche fermée.

Giovanni Merloni

écrit ou proposé par : Giovanni Merloni. Première publication et Dernière modification 28 juillet 2014

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