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Paris, Métro Passy
Chère Brigitte,
Au milieu d’une initiative collective où ma proposition n’a pas trouvé sa collocation, j’avais fait une petite « adaptation » des textes de « paumée » que tu avais publiés sur ton blog dans les mois de novembre et décembre 2015. Il s’agit en fait d’une double adaptation, parce que d’abord j’avais fait au jour le jour un extrait très exigu et parfois hasardeux de tes textes dans mes tweets (comme d’ailleurs je continue à faire), pour les « ranger » ensuite en fonction d’un fil narratif.
Dans mes extraits quotidiens, je ne cherche pas toujours à exprimer le contenu de tes articles, ni son message principal ou prioritaire, sauf des exceptions importantes. J’essaie de mettre en valeur ta personne, ton monde, ton esprit, ta façon de voir les choses dans le quotidien tout comme dans l’universel ou dans les livres.
Ton monde est incroyablement vaste et profond : « ce serait » très difficile en extraire un portrait exhaustif de ta personne et de ta personnalité. J’ai essayé tout de même de le faire, me donnant la contrainte d’un petit échantillon : deux de derniers mois de « paumée », où je t’ai suivi avec toute mon amitié et sympathie.
J’espère donc que tu aimeras mon hommage sincère ainsi que cette tentative d’esquisser enfin ton portrait (partiel et unilatérale, bien sûr) qui m’est vraiment cher.
Giovanni Merloni
Paris, quai des Grands Augustins
..À demain en pleine forme je le veux
Jour blanc
jour de cigares
sortis de la boite
et vertueusement
remis en place.
Mal entrée
dans la lucidité
que demande
un jour neuf…
avançais roulant un peu
dans mon regard endormi.
A ces volutes noires
qui sortent de notre mur
j’ai demandé
d’enfermer
les nuages blancs
qu’on nous annonce…

..des nuages
en masse cotonneuse..
plus percer,
à l’heure du thé,
que quelques taches
d’un bleu très pâle.
Voir à travers
permet l’intrication
d’un monde
dans un autre
et l’avènement
d’un paysage
poétique.
Paris, quai des Grands Augustins
Paumée tu me fais penser
à la pluie
qui imbibe
avec régularité
mon air
ma cour
la ville…
…la vie autour de l’antre
avec ses horreurs
ses dégoûts
ses admirations
et ses sourires.
Un jour où s’intéresser à la pénurie d’eau à Melbourne.
Me sens plus tout à fait chez moi. J’ai quand même osé sortir cet après- midi, dans le faux printemps de nos rues.
Il fait peut être
un tout tout petit peu moins
frio
mais la vieille oursonne
hésitait à sortir..
récompensée.

Les platanes
n’arrivent qu’à un beige
mâtiné de brun terne
ne sont pas arbres d’automne…
Dans le désert des lieux
(une femme assise
dans le fond..
yeux perdus, visiblement en besoin de solitude).
Paris, quai des Grands Augustins
…N’avons pas connu par nos yeux, nos mains.. ceux qui y étaient restés…
Sous les platanes roux
dont l’ombre charmait
le brutal
parallélépipède
blanc…

Charles Dickens
voyageur sans commerce
descendu à Arras
attendu à la gare
par deux chapeaux ecclésiastiques…
Un peu marre de constater à quel point les catholiques ont toujours du mal
avec la laïcité.

Leur tendance
à nous laisser
chaque année
un peu moins
le temps de vivre.
Et la révolte se rendort
se mue en maussaderie
venant colorer
la résignation
de mon corps
assis
contre une colonne.
J’ai senti
ma timidité
envahir carcasse
suis entrée
sans trop trébucher
yeux
oreilles
habillés d’un sourire.
Sourire
en réponse
aux sourires
sans préjuger
de ce que sont
les êtres
rencontrés.
Aimer les gens du quartier
qui ont ouvert
aux passants en détresse
en l’indiquant.

Trois plus ou moins longues
prises de parole
sensibles et sans fausse note
et puis
lumineux et doux
l’adagio.
Paris, quai des Grands Augustins
Je porte en moi beaucoup de pas dans les rues de Paris
des matins de cafard
contemplations jamais rassasiées.
La fenêtre venant découper
le visage par son reflet
Brigetoun
ou le spectateur
ne sont pas prévus.
Ai assisté brièvement
à un colloque
entre
un homme
et un arbre
ou une étoile.

…Mais ce texte là
me fait tout spécialement envie –
le journal de la brousse endormie.
(Il a aimé traverser l’antre où me coconnais)
On ne pourrait rien faire
si on écoutait les vieillards
ou alors faire
des choses insensées.
Pour me distraire
lire avec honte
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made in
China
Inde
Bangladesh.

Cuisine rapide, déjeuner, sombrer en longue sieste avec la conscience en
paix…
Musique traitée
en bruit de fond
(remords)
et musique écoutée,
et réflexion,
bien sûr,
réflexion.
En trois jours un chandail ne sèche pas MARRE

Pense que
finalement
me trompais
et repars,
avec
juste un peu trop d’indifférence.
Paris, quai des Grands Augustins
J’ai retrouvé inconsciemment le pas de parisienne qui sommeillait en moi.
Calme d’un moment
sortir dans l’humidité
flaques miroitent
pas sur pavés, eau, feuilles
et je retiens mon souffle…
Une presque douceur venant se glisser entre des rafales froides…
…en posant leur tendresse
sur les colonnes et Basquiat.
Ai suivi les trottoirs
en donnant des
coups de pieds
dans les feuilles
avec l’allégresse
d’une sale gosse.
Dans nos rues d’ombre
la mousse lasse
des feuilles était or sombre
dans la lumière.

Lumière dorée du jour qui monte
lumière adoucie, un peu plus tard,
pour accueillir mon retour
dans l’antre.

Premiers militaires
chargés
de nous protéger…
ai admiré l’accord
entre la tenue
et l’écorce
des platanes..

La couleur
digne d’Uccello
de la Bataille
de San Romano
dans la ligne
des madrigaux
musique
sans tohu bohu..
Paris, quai des Grands Augustins
…La culture…
Si entrons
dans une glaciale
et longue phase
que mon crâne
se refuse
à imaginer.
…Ne pourrais plus aimer
et, zut, ne pourrais plus rager,
ni même penser, dire ou écrire des stupidités.
Ô nous
les ingénus réveillés
n’oublions pas
que seule compte
la fraternité humaine
à préserver
à pleurer
à renouer…
Ô vous
qui avez ainsi empiré
ce que l’Occident
avait contribué
à créer…
Écouter l’évocation des fronts en Syrie et imaginer une seconde ce qu’est la
vie d’un syrien pacifique.
Paris, quai des Grands Augustins
M’en suis allée dans la neutralité absente.

Avançais dans la douceur de l’air et les petits éclairs que posait la lumière
sur les fers des façades.

Dans les rues ce matin,
un petit mistral
qui fouettait le bleu du ciel,
des résistantes
et des chutes…
Ce vent..
un adolescent
plein de fougue
m’a fait admirer
un vol
de martinets..
sautant
par dessus
le rempart.
Dans le petit vent
qui fouettait
juste pour un massage
mes joues
des idées
me sont venues.
En grimaçant
devant certaines
prises de position,
en fuyant
la campagne électorale
sous couleur
de «débat».
Les mots
cette merveille
avec lesquels
les humains correspondent
et ne s’entendent pas.
Paris, quai des Grands Augustins
M’en suis allée, comme un hors d’oeuvre, pour me mettre en appétit de vie
et puis d’activités…
Un simple coup de ciseaux
et un collage,
déorganisant-réorganisant
les mots et les pages.
Je me suis promis
de ressortir
mes bonnets
de petite vieille sage
pour garder
douillettement
mes pensées.
Suivre
la courbe
tendue
des rues
dans la tombée
du soleil
grimper
vers l’autre
beau jardin
de l’après-midi.
Ma carcasse est ainsi, elle a une indéfinition brigetounienne, mais ce n’est
pas grave.
Portant nouvelles d’aimés
portant envie de dormir
portant images de feuilles..
Je dors
..en dehors de tout
et dans une carcasse rétive et floue
..à demain en pleine forme je le veux.
Brigitte Célérier
Paris, quai des Grands Augustins
un immense merci (en plus dans les dames des Grands Augustins je retrouve mes amies d’autrefois admirées dans les vieux numéro du Journal des Demoiselles)
Très bel hommage, Giovanni !
Oui, nous aimons Paumée pour tout cela et encore bien d’autres choses…
Vos pensées apparaissent comme un lien entre passé et présent. Comment établir un pont entre l’adolescence et la vieillesse ? La mélancolie de vos photos entre Alma et Marceau en font résonance.