le portrait inconscient

~ portraits de gens et paysages du monde

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Archives de Tag: Solidea

Irène, 2005 (Solidea n. 18)

17 samedi Mai 2014

Posted by biscarrosse2012 in poèmes

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Solidea

001_irène 180

Irène
(paix après la défaite, ou à la veille d’une grandiose victoire ?)

Quelquefois,
je te vois arriver
ou plutôt pointer
parmi les ombres du boulevard

Je te vois pirouetter, surprise
par un son intérieur
par une sonnerie d’enfer.

Essoufflé, j’allonge le pas,
coupant l’asphalte
en diagonale.

Ainsi je te dépiste, ou alors
c’est toi qui me dépasses.

Je m’enfonce dans le bar du décaféiné
tandis que toi, Irène, tu poursuis, élégante,
interrogative, hésitante
jusqu’à la porte insignifiante.

Angoissant, l’ascenseur me hisse
dans le court couloir. Devant les toilettes
une barbare négligence a supporté
que toi, la brune Irène aux mains blanches,
élégante comme une vedette,
tu t’assisses juste là, suspendue
sur un tréteau d’air.

Presque une demi-heure
s’est écoulée
(Elena n’est pas arrivée).
(Il y a toujours une pause)
(un échange de rumeurs)
(peut-être, j’épie tes « Ciao »,
tes soupirs)
(peut-être, tu écoutes
à contrecœur mes répétitifs discours ;
peut-être, de façon audible,
j’engloutis le crapaud
en m’apercevant que toi,
innocente et hardie,
tu lâches, gémissant,
parmi les bruits sourds de l’esprit,
de souffles de jeune vie ;
peut-être, tu soupires
silencieusement, si j’écrie,
tout en réprimandant quelqu’un
ou l’air, ou que je dis en grésillant
plusieurs fois « Zut ! »)

(entre-temps, Elena est arrivée).

002_terminal ostiense quadro 180

Presque cinq mois
se sont écoulés
et nous parlons encore de travail
juste dans les pauses de travail.

Parfois, imprudent ou superficiel
(quand Elena n’est pas là),
sans prétextes
(de loi ou délibération)
je débarque dans ta chambre au-delà
sans les excuses de l’âge
(je n’ai plus cet âge-là).

Coincée aux cordes du ring
en tournant l’œil égaré
(tout de même gentille),
tu subis mes mots brouillons :

PLUS DE TRANSPARENCE
MOINS D’ABSOLUTISME !
MOINS DE BUREAUCRATIE
PLUS DE VIE !

Entrant et sortant, la lumière
envahit la petite chambre au grand
bureau (ou alors s’enfuit
par la fenêtre, tandis qu’Elena,
imperceptiblement, enregistre et signale
toute variation climatique).

Caressée par le soleil
ou chérie par la lune,
tu hoches tes cheveux
tout en approuvant l’onde
de la fin heureuse. Ratatinée
et photogénique, tu glisses
volontiers sur la barque
ayant échoué
de l’AUTORITÉ (1).

Ou alors, obscurcie,
tu te sauves
dans l’angle le plus sombre
ou tu serres dans tes bras
la plante grasse
et tu deviens la figure de proue
du Titanic-ÉTIROTUA
qui s’effondre déjà.

Je t’attends, Irène
pacificatrice belliqueuse,
obligée de pratiquer l’escrime
pour esquiver la caserne
indisciplinée et rassise
comme du pain peuplé
de mouches.

003_fontanella 180 antique

Il nous faudrait, à nous tous,
une différente tranchée,
un plateau lumineux,
un placard garde-robe,
des toilettes éloignées et discrètes,
un téléphone secret
ainsi qu’un monde renversé
où l’on puisse dire sans timidité
AUTORITÉ
un petit mot qui porte bien
dont la signification convienne
demander à Irène.

Giovanni Merloni

(1) Dans ce mot AUTORITÉ se condense et se résume le travail de sept ans, de 1999 à 2006, que j’ai exploité dans un rôle de responsabilité. Ce n’est pas la peine ici d’entamer un récit qui demanderait un petit survol historique. Laissons cette « poésie d’un jour » libre de s’exprimer.

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écrit ou proposé par : Giovanni Merloni. Première publication et Dernière modification 17 mai 2014

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Le pro-fil d’Ariane, 2004 (Solidea n. 17)

28 lundi Avr 2014

Posted by biscarrosse2012 in poèmes

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Solidea

001_le pro-fil d'ariane NB 180Le pro-fil d’Ariane (2004)

Ariane
Tu montes et descends.
Ton corps deguisé
(enveloppé, juste cenné)
entre et sort, subite
(derrière le fil homonyme)
à travers ton special
regard azuré.

Ariane
tu te confies et te plantes
puis, assez tôt
sans prétextes
— par un léger, élégant
tourbillon — tu disparaîs.

Ariane
(il faut l’admettre)
tu n’effaces pas tes conquêtes
se balançant à ton fil
pendus à jamais.

Pourtant Tesée, ton Tesée
(en renversant les conventions
et dénaturant le mythe)
tu l’as laissé
seduit et abandonné
à se faire dévorer
par le remords divin.

Aux autres, de loin,
depuis tes odyssées à rebours,
tu accordes ta présence
bienveillante :
et l’on garde en reliques
tes cartes postales
où tu t’incastres, petite
à peine perceptible
dans les épaisses lignes du monde.

Confiant j’attends tes retours.

002_ariane 01 180

En-air-a
mère et soeur de Marie
tu accepterais
n’importe quelle aventure :
tu laverais Jésus ;
tu accompagnerais un aveugle
au-delà de la mer ;
volontiers tu lui raconterais
les leurres pâtis
par le vaisseau pirate
les écueils qui pourraient briser
(d’un moment à l’autre)
la quille noire, perdue
au-dessous de sillages gris

mais tu croirais cet aveugle
s’appelant Homère ou Tirésias
ou Ray Charles ;
tu croirais que ces voix
dilatées, vaticinatrices
peuvent lancer
hors de ses orbites
le monde.

003_ariane 02 180

En-air-a
samaritaine
rêvant les yeux ouverts
lumière qui glisse
sur le dos de la mer.

En-air-a
patronne des amoureux
qui perdent la raison
juste pour se sauver.

004_ariane 05 180

Ariane
dans ta force vitale
demeure une étrange douceur
senti-physique
et senti-mentale,
Une ressourse noble
généreuse, argentine.

Ariane fontaine
grotte précieuse
tombant à pic
(comme un diamant)
dans la mer.

Ariane vague marine
qui s’enroule
(douce anxieuse
moelleuse silencieuse)
dans la petite échancrure intime
d’une île.

005_ariane 04 180

Ariane mère et fille
sanctificatrice de la joie
sanctuaire de la vérité
auberge de la vie.

Ariane au-dedans au-dehors
(rires et larmes)
(légèreté et poids de la vie):
Ariane tourniquet
Ariane, parmi toutes
les femmes-port de mer
tu pourrais être Gênes
ou Naples ou Bordeaux
parmi tous les océans-femme
la Méditerranée.

Ariane
En-air-a
grotte, petite plage, ninfe
vestale, ambassadrice
plume sans chapeau
amie comme
elle seulement le sait
être.

Giovanni Merloni

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écrit ou proposé par : Giovanni Merloni. Première publication et Dernière modification 28 avril 2014

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Ballade du moi-narrateur, 2005 (Solidea n. 16)

04 vendredi Avr 2014

Posted by biscarrosse2012 in poèmes

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Solidea

000_moi narrateur001 180

Ballade du moi-narrateur (2005)

Moi, narrant,
toujours fatigué,
toujours ambulant,
je voyageais incertain
dans le monde aimé
tout en me dérobant
à son corps abîmé :

autant de roses
j’en ai touché

autant de larmes
j’en ai pleuré.

001_amsterdam 1 180

Moi, errant
entre amour et envie
entre mégalomanie et guerre,
j’ai creusé des monts de mystère,
j’ai bu des fleuves de folie.

002_amsterdam 2 180

Moi, narré,
toujours désargenté,
toujours harcelé
par des créditeurs de faveurs
(que je ne savais pas exaucer)
par des négatrices de baisers
(que je ne savais pas voler).

Au fond du train
qui m’a dévoré
moins que serein
j‘étais angoissé.

003_amsterdam 3 180

J’ai écrit dans une boîte
faufilée dans une trappe
roulante.

J’ai écrit de jet et de pisse
en me transformant
en couleuvre qui glisse.

J’ai écrit depuis le berceau
des menaces à une fille
perdue dans le troupeau.

J’ai écrit sur ta martingale
que tu m’avais transmis la gale
par ta fureur bestiale.

J’ai écrit sur la comète
une pensée d’ascète
ne me désaltérant jamais.

J’ai écrit la trame
d’une exaltante flamme
ne me comblant jamais.

J’ai écrit en diagonale
ma hantise ancestrale
végétale et animale.

004_amsterdam 4 180

J’ai cessé d’écrire,
car enfin c’est égal :

à quoi bon toute gloire
si jamais le chagrin s’arrête
si la douleur m’encage
si la fille va disparaître
que quelqu’un d’autre caresse
derrière une coulisse
ou dans une trappe ?

005_amsterdam 5 180

Giovanni Merloni

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écrit ou proposé par : Giovanni Merloni. Première publication et Dernière modification 4 avril 2014

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L’art de la non-rencontre, 2004 (Solidea n. 15)

26 dimanche Mai 2013

Posted by biscarrosse2012 in poèmes

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Solidea

l'art de la non rencontre_def_740Giovanni Merloni, 1993-2013

L’art de la non-rencontre (2004)

Que fais-tu là
avec tes grands yeux
qui percent les nuages et les pierres ?
Pourquoi juste contre toi
devait se cogner
la vague démesurée et dégonflée
de mon naufrage inconnu ?

Quel mot doux
ou cinglant ou mystérieux
a filtré de tes lèvres violettes ?
Qui suis-je, du moment que je traîne
en bas de chez toi ?

Comment pourrais-je justifier mes vers
mes claudicantes sérénades muettes
mes remue-ménage intimes ?
Comment t’expliquer
qu’il arrive parfois
(du moins une fois dans la vie)
qu’on se devine
parfaitement forgés
l’un pour l’autre ?
Et qu’on reste pourtant là,
immobiles
regardant dans la vague
de ces corps qui ne s’embrassent pas
de ces mains
qui ne se mêlent pas
et de ses bouches
qui ne s’effleureront jamais ?

Rien. Il n’est arrivé rien,
le silence nous assourdissait
le vacarme nous apaisait,
je ne cherchais pas ma fortune
dans ta chevelure brune,
toi, tu n’as vu que défauts
dans mes allures d’escargot.
Nous restâmes dans le non-dit
dans le non-entendu
figés devant la vague de mort
qui roulait empressée
devant cette table desservie
en attente dupe
qu’un autre couple l’occupe.

002_che c'entri tu 740

Photo : Collection Frères Merloni. Reproduction interdite

Je demeure ici, embarrassant objet
sous les yeux rouges des gens
ne lâchant plus ces maisons jaunes
ces trottoirs bourrés de pantins
encombrés par les restes
de mille festins.
Je ne descends ni ne monte
n’ayant d’autres projets
que celui de scruter les reflets
de ma défaite et de ma honte.

D’une certaine façon tu m’héberges
tu me laisses un abri
un non-lieu près de toi
où je peux
m’adonner à ce train immobile
à son onde invisible
paralysante
me questionner sur le non sens
brutal de la vie.
Je n’ai même pas eu le temps
de te dire que j’étais un marin
un vaisseau ne faisant qu’un
avec l’eau de la vie,
qu’à présent je deviens
un fleuve à sec.
Je n’ai pas pu te dire
par où je débarquais.

Quand tu t’es accoudée au balcon,
souriante et irrésistible
j’ai oublié tout à fait
toute façon de parler
mais j’ai pu bien te lire
pénétrant jusqu’au fond
dans ton petit livre ouvert
où ton chagrin se fond
dans un pénible concert.

J’ai perdu la parole ?
Bien possible, mais toi,
rare et unique, presqu’au vol
tu interceptes les mots confus
juste en train de se préciser
ou de rater tout sens.
Le bon sens te guide-t-il ?
As-tu peur de t’attacher
à qui ne saurait pas t’aimer ?

Parmi les murs de la rue
les gens glissent comme de l’eau
dans les doigts. Je t’imagine
assise dans un fauteuil quelconque
à l’écoute de mes pas qui montent
et redescendent ton escalier,
une plante grasse à la main,
un journal dans la poche.
Pourtant je traîne toujours dans la rue
glissant parmi les murs mon désespoir
pour un naufrage qui n’as pas eu lieu
pour un divorce jamais consommé,
pour un mariage jamais envisagé
pour un baiser passionné
resté dans l’antichambre
d’un grand palais vide.

J’aurais été capable
de te faire un furieux portrait
rien que dessinant ton cou,
par cœur, et juste en naviguant
dans la flaque sombre de tes yeux.
Pourtant, dès qu’on s’est rencontrés
nous nous fuyons
nous laissons le temps se rouler
sans oser le saisir
nous laissons glisser les choses
comme de l’eau parmi les doigts.
Pourtant on était attirés
par ce miroir de brouillard
où se croisaient distinctement
nos deux labyrinthes silencieux.

003_155394 neg 740

Photo : Collection Frères Merloni. Reproduction interdite

Piétinant parmi ces ruines
la tête baissée
je me comprends, je te devine
et j’essaie de me dérober
avant que ce tourment léger
ne devienne lourde souffrance.
J’imagine alors monter dans le train
pour retourner en d’autres non lieux
où tu peinerais à me trouver,
où je n’aurais pas la force
de t’attendre, où le train de la vie
n’aurait surtout pas l’envie
de se remettre en marche.

Mais, que fais-tu là
avec tes grands yeux
qui percent les nuages et les pierres ?
Et moi, que fais-je ici
traînant ma silhouette hideuse
en bas de chez toi ?

Giovanni Merloni

écrit ou proposé par : Giovanni Merloni. Première publication et Dernière modification 23 mai 2013

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Histoire de bureau (Solidea n. 14)

21 mardi Mai 2013

Posted by biscarrosse2012 in poèmes

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Solidea

001_storia d'ufficio def 740

Giovanni Merloni, 1991-2013

Histoire de bureau (1994)

Comme eux, se sera impossible
de devenir.
Sa veste à grands carreaux, usée,
son œil rougi, chassieux
sa voix raisonnable
plaintive.
Et ses samedis qu’il laisse
s’écouler avec ses victimes
ces Dioscures pourtant enthousiastes
de sa prodigieuse mémoire
de ses retentissantes dictées
bourrées de pénibles réponses,
assez longues, au mur.

Avec son triste paletot
agrippé au cartable presque vide
toujours accompagné
Grisaglia a d’ailleurs voyagé.
Il a aussi exploré, fouillé
et quelque part habité.

Il rencontre parfois
furtivement
son confrère plus âgé,
Romandini. Et alors courbés,
se tapant l’un l’autre sur l’épaule
ils filent vers le bar
à vins.
En buvant, s’achemine
le souvenir doux
blondi par le reflet du soleil
illuminant le bord
de la coupe.

« Cette fois-là du concours
pas question de remboursement ;
cette fois-là de l’examen
tout ce fatras
d’inutiles papiers ministre
puisqu’on savait déjà.
Cette fois-là le Président
du Comité était agité
le souffle lui manqua
car le projet était déplacé.
Ce fut quand même approuvé ».

Grisaglia sanglote
en riant désespéré
et Romandini l’observe, ennuyé.

« On était harcelés
écrasés par le terrible étau
de ce caporal majeur
qui est encore là, tout pris
à se donner une importance
dangereuse ».

Presque tous les jours
dans ce tramway grinçant
on cherchait le moyen
de réagir.

« Pas grand-chose à comprendre,
mon hideux souverain
mais tu restais là, ineffable
derrière tes lunettes à la Béria
prêt à nous meurtrir
avec un nouvel imbroglio
qui resterait impuni ».

Parmi les étagères métalliques
du patron
on a pu trouver une chaise jaune
pour Romandini éreinté, essoufflé.
Grisaglia regarde désarmé hébété :
au-delà de la vitrine
parmi les bouteilles vieillies
dans la rue des merdes de chien
on voit passer
la voiture du caporal
qui lance, en roulant
des dossiers incendiaires.

002_storia d'ufficio De justesse ils se sauvent
les deux collègues vaincus
accrochés tels des enfants
à leurs souvenirs ivres, gazéifiés,
finalement insouciants
de toute dignité vaine.

Pourtant, ces anciens conservateurs
d’étagères bien rangées
et de registres en désordre
s’abandonnent à des gestes de rage.
Je les vois distinctement
ces anciens inventeurs
de hasardeux escamotages
pourtant méprisés
pour leur orgueil d’honnêteté,
je les vois bien
traînant dans la rue
tout en lançant, dans leur débâcle
un soupir d’envie à cet implacable
donneur de chantages.

Comme eux, ce sera impossible
de devenir.

Giovanni Merloni

écrit ou proposé par : Giovanni Merloni. Première publication et Dernière modification 21 mai 2013

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Être ou mal être, 1994 (Solidea n. 13)

20 lundi Mai 2013

Posted by biscarrosse2012 in poèmes

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Solidea

001_il tram 81 1994 740

Giovanni Merloni, 1998

Être ou mal être (1994)

Être ou mal être
tel est le souci.
Entendre, malgré toi
l’imprudent qui vocifère son
répétitif “pas-de-souci”
tel est le souci.

Devenir Romandini
vieillir à l’identique
derrière d’épaisses lunettes embuées
se promener courbés
bredouillant tout seuls
la gêne
du quotidien voyage pendulaire
tel est le souci.

Se sentir mort
vis-à-vis de la vitalité grise
des usurpateurs
tel est le souci.

Sourire en cachette
parmi des sons agréables
tout en essayant
de détendre l’esprit
sur de lointains prés fleuris
en enserrant dans la mémoire
le souvenir d’un baiser
secret et scandaleux
tel est le souci.

Grisonner en silence
derrière une vitre couverte de smog
en se souvenant de quelque héroïsme
de quelques pirouettes
ou bravoure insoupçonnée
quelque bravo
pour une fois mérité
tel est le souci.

Suivre de la fenêtre
le boiteux Romandini
avant qu’il ne tourne au coin
et décider, tout comme dans la cabale
si moi et lui ne pourrions jamais
devenir égal
tel est le souci.

002_essere malessere 740

Se trouver dehors
(les mains et les pieds
les jambes et les bras)
dans une vaste place informe
parmi des faces sournoises
ou dégoûtées, sombres, marrons
éloignées de mille lieues,
tel est le souci.

Rentrer dans l’habitacle brûlant
et noter
sur un feuillet souillé
avec un stylo liquéfié
une insistante question
tel est le souci.

Giovanni Merloni

écrit ou proposé par : Giovanni Merloni. Première publication et Dernière modification 20 mai 2013

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La nouvelle vie III/III, 1992 (Solidea n. 12c)

19 dimanche Mai 2013

Posted by biscarrosse2012 in poèmes

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Solidea

001_trenino balduina 740

(revenir à la liste du « Train de l’esprit »)

La nouvelle vie III/III (1992)

Une nouvelle vie recommence :
quelle que soit sa durée elle sera
inattendue, complaisante
et même douce, ardue mais
déchiffrable, alléchante même.
Elle aura la douceur
douloureuse de souvenirs affleurant en bandes
pour caresser mon orgueil lointain.

Recommence la vie, après la vie.
Une vie qui semble grise
après les mille couleurs
qui explosaient vers le ciel.
Les mille lumières s’enfoncent,
à présent, dans la brume
et les mille bruits gisent
inertes sous une manteau d’étoffe.

Mais je survis, malgré les étaux,
les étranglements, les méchancetés
l’absence d’enthousiasme et de recul
l’absence de joie et de stupeur,
l’absence de mots
l’absence de promenades.
Je survis en rasant, avisé
le mur de briques
en repoussant les pensées
dans les détours vicieux
dans les va-et-vient
dans les attentes longues et inutiles
dans les salles d’attente
de mille gares.

002_portico ottavia 740

Recommence la vie
dans ce répertoire de numéros et de noms
à remplir ou à perdre,
en les jetant d’en haut de ce pont
où le train immobile attend,
éteint, dans la nuit.

003_eur ridotto antique 740

Giovanni Merloni

écrit ou proposé par : Giovanni Merloni. Première publication et Dernière modification 18 mai 2013

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La nouvelle vie II/III, 1992 (Solidea n. 12b)

18 samedi Mai 2013

Posted by biscarrosse2012 in poèmes

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Solidea

due donnine blu_740

Giovanni Merloni, 1999

(revenir à la liste du « Train de l’esprit »)

La nouvelle vie II/III (1992)

En marchant nous nous lorgnons à peine
sans véritable curiosité, encore
engourdis, déchirés, marqués
par de précédents désastres.

Un second voyage commence
dans le verre éblouissant et les tubes
d’une architecture bâtie à la hâte.

Sans hâte commence la routine
et les raisonnements muets,
mesquins, inavoués.

Ils recommencent, dans les temps morts
les petits projets stériles de fugue
les petites stratégies infimes de survie.
002_istruzione 740Recommence un voyage
bras dessus bras dessous
avec d’autres semblables, dissemblables,
dans les désaccords épuisants
les saluts d’automates,
les protestations d’automates
jusqu’à découvrir en soi l’apathie
et même la joie
pour ce délire collectif
pour ce grand accommodement
qui ôte – élargit
ôte – élargit
ôte – élargit.
003_circo massimo 740Accoudé devant la nuit
qui court derrière la fenêtre
je rentre chez moi.

Tandis que le train frôle les maisons
les montagnes de terre, les travaux
j’effleure, la bouche immobile
des visions soudaines et je verrouille,
dans la pensée rapide, la famille
ceux qui me saluent à peine,
en secouant les cheveux, ceux qui m’attendent
muets, derrière la fenêtre, parmi les lueurs.
004_garbatella 740 (continue)

Giovanni Merloni

écrit ou proposé par : Giovanni Merloni. Première publication et Dernière modification 18 mai 2013

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La nouvelle vie I/III, 1992 (Solidea n. 12a)

17 vendredi Mai 2013

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Solidea

001_la nuova vita 740

(revenir à la liste du « Train de l’esprit »)

La nouvelle vie I/II (1992)

Ça commence par un pari têtu
(encore un têtu! encore un pari!)

Ça commence par les pieds
qui redeviennent véhicule
pour des arrivées et des départs
et d’autres promenades oisives
(ou des spectacles surprenants
si jamais l’on s’arrête
à regarder en bas
d’en haut des ponts de fer).

Le matin s’ouvre, juste au bord de la nuit.
Une lumière s’allumant dans la cage
du marchand de journaux. On arrive assez tôt
à la petite gare inconnue, peut-être inventée,
bien sûr créée exprès pour moi.

Le petit train s’en va glissant
parmi les dessins déchirés, effleurant
à peine le poids léger de la journée.
Par une étrange douceur il me conduit,
(ballot de laine et de mouchoirs)
vers la première lumière qui pointe
soudain de la fenêtre trempée.
002_la nuova vita 740Vacillant j’essaie de faire une liste
des villes et des lits
où je me suis couché, parfois, seul
où j’ai marché, attiré par les maisons
par les petits escaliers de pierre,
attiré même par les laids
bâtiments industriels, par les casernes en ruine,
par les manufactures de tabac
désaffectées aux abords des boulevards,
pâturées sans hâte
par des brebis au poil jauni.

Elle me surprend encore, comme une caresse
elle me fascine encore la petite fumée
qui révèle le réveil laborieux. (Je dis laborieux
même si, parfois, ici chez nous
c’est un réveil canaille, paresseux.)

Le petit train file et cahote
révélant une file de gares insoupçonnées
et une petite foule d’êtres humains
qu’on ne pouvait pas soupçonner
déjà habillés, tous prêts
à se jeter réconfortés, même privilégiés
dans l’enchevêtrement discret des escalators.

J’adore vraiment les marquises,
les gares, les escalators,
les tapis-roulants, les grands escaliers, les parapets.

Je les adore et j’en ai peur.
Attiré je me penche jusqu’au point-limite
qui sépare mon monde agité, de chair et d’os
de ce fourmillement sans angoisses
croisement cinématographique de corps
manteaux, casquettes, sacs
de ce peuple embrouillé
réveillé avec une douceur maléfique
et vertigineusement mêlé
parmi les couleurs, les odeurs
des vieux palais de travertin
que les ombres et le soleil
caressent à peine
comme un vent froid.
003_la nuova vita def 740(continue)

Giovanni Merloni

écrit ou proposé par : Giovanni Merloni. Première publication et Dernière modification 17 mai 2013

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Dans la matinée déjà usée, 1993 (Solidea n. 11)

14 dimanche Avr 2013

Posted by biscarrosse2012 in poèmes

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Solidea

001_disegno signora 180

Dans la matinée déjà usée (1993)

Dans la matinée déjà usée
ma fragile hanche
traîne. Me fortifie
la petite fumée qui boite
jaunissant sur la manche
de l’horizon qui pâlit.

Là, jetée sur un banc
une fille en noir et blanc
me révèle son flanc.

J’ai arrêté le moteur
verrouillant la rousseur
que provoque cette odeur
prometteuse de bonheur.

On ne parle pas d’honneur
ou d’issue à la langueur :
il n’y a que de la stupeur
face à cette splendeur.

002_campo de fiori anni 80 180

Rentre au bout de la vigne
la ferraille indigne
éteignant ses poumons
dans l’odeur des pignons.

La garçonne vaniteuse
tout en grinçant des dents
enlève ma main du volant
en se feignant joyeuse.

Silencieuse campagne
doucement accompagne
par rengaines ou aussi barbes
mon inspirée compagne.

Chaude pluie tu me baignes
heureux corps tu me gagnes
par une danse d’Espagne.

003_campo de fiori anni 80 180

Lorsque je rentre en courant
vomissant ou riant
je me découvre effrayant
dans le plaisir bruyant.

Elle me semble moins dure
mon odierne figure :
souterraine se rassure
mon envie d’aventure.

En venant depuis la manche
je deviens une avalanche
et, pressant sur la hanche
par une voix qui s’épanche
je hurle :
« Vive la zone franche ! »

Giovanni Merloni

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écrit ou proposé par : Giovanni Merloni. Première publication et Dernière modification 7 juin 2014

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